Ado porno, ou "On ne badine pas avec l'image"

Il a 14 ans, regarde ses pieds, et soudain, relève la tête. « Oui, j’ai baisé cette fille, et je l’ai passée à mes copains, c’est vrai… Mais elle n’a jamais dit « non » !
La victime dans cette histoire est cette jeune fille, bien sûr. Sa vie, sa chair, son avenir… tout est marqué.
Mais il y a une deuxième victime, une victime indirecte, une victime bourreau. Oui, le jeune homme est une victime aussi. Sa vie, sa chair, son avenir… tout est marqué.
Aujourd’hui on soigne. On accuse. On punit.
La jeune fille est violée au moins trois fois : une fois par le mec (et ses copains), une fois quand elle raconte aux policiers et une fois encore quand elle se trouve face au juge. Raconter, encore et encore, l’abominable séance de torture.
Et lui ? Se pose-t-on la question du « pourquoi ?» Non pas celle du « il a des parents qui le battent, ou alcooliques, ou absents, ou… » hou hou fait le hibou.
Non, la question est le modèle. La sexualité de l’ado est porno. Il voit des images, chaque jour s’il le souhaite, facilement accessibles, de scènes de viol, d’humiliation, de gang bang, et autres « abominables séances de torture ». Il voit, il apprend, il répète. C’est comme ça qu’on fait l’amour ! C’est drôle ! Et en plus, la fille elle adore puisqu’elle ne dit pas « non »…
Savent-ils seulement ces ados que le porno n’est pas l’amour ? Que le porno emprisonne la femme dans un rôle qui n’est pas le sien et emprisonne également l’homme dans un rôle qui n’est pas le sien ? L’amour n’est pas de boucher des trous. Oui, mais qui leur a dit ? Qui leur a montré ? Qui leur a enseigné ?
L’amour est un acte sacré entre deux âmes qui s’unissent dans un partage de plaisir. « Il y a au monde une chose sainte et sublime, c’est l’union de deux de ces êtres…»*
L’ado porno est stigmatisé, avant même de commencer une vie à deux, par des images réductrices. Le porno est avant tout un immense business, une machine à fric, comme n’importe quelle drogue. On crée une dépendance, on y revient, on en redemande, toujours plus, toujours plus souvent, toujours plus fort.
Et ce jeune homme se retourne dans son lit, il s’excuse auprès de la jeune femme qui est couchée à ses côtés. Il ne peut pas, il n’arrive pas, il est navré, il est nul… Il ravale sa morgue, sa honte, sa tristesse.
Pourtant, elle disait « oui » elle !
* Alfred de Musset, On ne badine pas avec l’amour.

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